C'était ce matin sur France Culture, Emission Répliques, la présentation de l'oeuvre de Emmanuel Lévinas, à propos de l'édition de ses Oeuvres complètes, et notamment de ses Carnets de captivité.
"Le pathétique de l'amour consiste dans une dualité insurmontable des êtres..."
Pour ceux qui voudraient s'initier à la philosophie de E. Lévinas, qui n'est pas d'un abord facile, je recommande le très limpide : La sagesse de l'amour, de Alain Finkielkraut, et aussi les livres magnifiques, mais difficiles, de Catherine Chalier: De l'intranquillité de l'âme ou encore : Pour une morale au delà du savoir.
4 commentaires:
J'ai repensé à la phrase de Dostoievski qu'Emmanuel Levinas commente dans Ethique et infini: "je suis responsable de tout et de tous et moi plus que les autres".
Aujourd'hui on entends:
- "Je ne suis responsable de rien, de personne et moi je suis la victime innocente des autres"
- "Je ne suis responsable de rien, de personne et moi je m'en fou: après moi, le déluge"
- "Je ne suis responsable de rien, de personne et je n'y peux rien, c'est le monde"
Si la phrase de Dostoievski a un sens, je la modifierai aussi, car elle est fondée sur une éthique qui reste la culpabilité. A la place, on pourrait dire:
"je suis responsable de tout et de tous, et moi plus que les autres. Je peux faire quelque chose de cette charge, par mes techniques et par où j'ai prise, si petit que je puisse être!".
Merci de m'avoir rappelé ce texte dont j'avais oublié l'origine exacte. je vais faire demain un billet sur la responsabilité.
Pour moi la technique n'est pas la solution, mais le pb (cf Heidegger et Michel Henry, "La barbarie")
Le contexte exacte de la citation se trouve chez Dostoievski dans les frères Karamazov, si mes souvenirs sont bons.
Il y a le fameux passage où Ivan Karamazov annonce "si Dieu n'existe pas, tout est permis", puis son long poème où il défend sa position athée.
Ensuite se trouve la réponse à cette position à travers l'histoire du staretz. C'est dans cette réponse que l'on trouve cette phrase sur la responsabilité.
L'argumentation d'Ivan est très bonne, reste sa déclaration moins athée que nihiliste. Le livre en appelle à la responsabilité au delà du nihilisme mais le personnage censé incarner cette nouveauté reste assez peu défini: Aliocha.
Je fais une lecture hérétique: Yvan a raison, et à partir de la mort de dieu, il faut inventer un autre mode de responsabilité. Ce personnage qui ne vient pas, qui n'en finit pas de ne pas venir, c'est celui qui pourrait dire: ce qui est permis dépend d'une "posologie" car la technique est à la fois le problème et la solution. Si Dieu n'existe pas, il n'y a plus une grammaire unifiée du monde, mais il y a des grammaires, à agencer selon une pharmacopée.
Mais d'autres positions sont possibles -comme celle de Lévinas-, bien entendu...
Je vous donne la citation exacte: "Nous sommes responsables de tout et de tous devant tous, et moi plus que tous les autres"(Ethique et infini p 98, p 95).
Excusez moi pour la déformation, mais cela ne change pas profondément le sens. Lévinas commente en disant: "le moi a toujours une responsabilité de plus que tous les autres". Mais il avertit aussi: "on peut se montrer scandalisé par cette conception utopique et, pour un moi inhumaine" -le problème c'est surtout qu'il nous laisse sans arme de mon point de vue...
Ethique et Infini est un petit livre d'entretien avec Lévinas, l'un des plus accessible.
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