"Le vote de la honte" : c'est le titre de Libé à propos du vote Suisse.
Entendons-nous bien.
Ce qui choque, ce n'est pas que les suisses, consultés, n'aient pas envie de voir des minarets. Après tout ils ont bien le droit.
Entendons-nous bien.
Ce qui choque, ce n'est pas que les suisses, consultés, n'aient pas envie de voir des minarets. Après tout ils ont bien le droit.
Ce qui choque c'est cette nouvelle logique.
Un parti (en l'occurence de droite ou d'extrême droite) propose un référendum sur une question impertinente.
Pourquoi impertinente?
Parce que si (horreur! ) les gens répondent oui, que fait-on? On change la constitution? Pour établir une loi anti-constitutionnelle?
Car en Suisse, comme en Europe, (arrêtez-moi si je me trompe) une loi discriminante est de ce fait anti-constitutionnelle.
Un parti (en l'occurence de droite ou d'extrême droite) propose un référendum sur une question impertinente.
Pourquoi impertinente?
Parce que si (horreur! ) les gens répondent oui, que fait-on? On change la constitution? Pour établir une loi anti-constitutionnelle?
Car en Suisse, comme en Europe, (arrêtez-moi si je me trompe) une loi discriminante est de ce fait anti-constitutionnelle.
Pourquoi ne pas faire un référendum d'initiative populaire en France (si ce dispositif était adopté en France) pour savoir par exemple si les homosexuels ont le droit de s'unir (ce serait non, actuellement) ou si les anglais ont le droit de continuer d'acheter des maisons dans le Gers, ou si les femmes stériles ont le droit de faire appel à des mères porteuses, ou si une femme peut se promener dans la rue voilée (avec Burqa notamment), ou s'il faut établir partout une mosquée là où il y a une Eglise (principe d' égalité entre les religions etc...) , ou s'il faut fermer les hôpitaux de proximité etc...
Bref, pourquoi ne pas régler tous les problèmes de cette manière et en finir une fois pour toutes avec la constitution (cadre contraignant qui nous impose de considérer que la loi est la même pour tous, conformément à l'approche de Rousseau).
Bref, la Suisse nous montre la voie de la "pure démocratie" comme le disait Mussolini !
Bref, la Suisse nous montre la voie de la "pure démocratie" comme le disait Mussolini !
Sur les pièges de la démocratie directe lire l'analyse de Henri Tincq
6 commentaires:
(Commentaire partie 1)
Permettez moi de réagir, en ces terres qui ne sont plus miennes. En effet, n'étant ni philosophe, ni politiste, mais juste un simple étudiant en droit, je me permets d'éclairer ce billet.
Ainsi, je n'interviens pas ici pour y faire un jugement de valeur, mais juste vous dire ce qui est possible aujourd'hui avec les outils juridiques que nous avons à notre disposition.
On se retrouve ici face à un cas intéressant, qui est celui du référendum.
D'ores et déjà, et vous avez bien fait de le dire, le référendum d'initiative populaire n'existe pas en France. Néanmoins, et je vous renvoie à l'article 11 de notre chère Constitution, il est possible depuis la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.
Mais, me direz vous, il n'y a pas d'applicabilité. Je vous répondrez que vous avez toute la raison, car le législateur prend le temps de faire les choses, et la loi organique qui expliquera le fonctionnement de ce référendum d'initiative populaire n'a toujours pas été présentée au Parlement.
La seule chose que l'on peut affirmer c'est ce que l'on trouve dans la Constitution : il faut 1/5 des membres du Parlement (ce qui inclut députés et sénateurs) qui représente 1/10 des électeurs inscrits sur les listes électorales.
Ensuite, je souhaiterai juste réagir à un de vos propos. Lorsqu'une loi est prise suite à un référendum d'initiative populaire, cette loi est donc référendaire. Elle a ainsi le même statut que celles prises suite après consultation du Président de la République par voie référendaire, par exemple pour le cas de la France (ça a été d'ailleurs de nombreuses fois le cas).
Or, et je me contenterai de notre droit français, n'ayant certainement pas la connaissance suffisante en droit comparé pour vous en parler, il y a ici un problème de taille.
(Commentaire partie 2)
Je vous renvoie à l'article 6 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen qui dispose dans son premier alinéa que "la loi est l'expression de la volonté générale". Confirmant ainsi notre attachement à Rousseau, et au concept de démocratie directe, je vous dirai simplement que le référendum est un des seuls moyens pour le peuple de s'exprimer directement (avec l'élection au suffrage universel direct), car nous avons une tradition représentative.
D'ailleurs le Conseil Constitutionnel, et c'est là que les choses deviennent intéressantes, s'est estimé incompétent pour vérifier la validité de toutes lois issues de consultations référendaires (Conseil Constitutionnel, décision du 6 novembre 1962 "Loi relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel direct").
Alors oui, l'article 11 nouveau de la Constitution dispose dans son alinéa 4 que le Conseil Constitutionnel pourra vérifier, peut être (et j'insiste sur le peut être), "le respect" des dispositions constitutionnelles (et pas toutes !), mais la loi organique qui va expliquer cela n'a toujours pas été présentée devant le Parlement.
Donc j'en reviens à ce que vous écriviez. Une loi issue d'une consultation référendaire, même si discriminante aux yeux de tous, ne sera jamais déclarée anticonstitutionnelle (écrit comme ceci), en l'état actuel du droit. Cela peut changer, mais je ne pense pas, car le peuple est l'essence même de notre Constitution. C'est le peuple qui tranche toujours en dernier ressort, c'est lui qui a "le pouvoir absolu" en ce domaine là, conformément aux idées de la DDHC.
Bien entendu, le point de vue que je vous expose est strictement juridique.
Par ailleurs, je ne sais pas ce qu'il en est dans les autres pays, même si je pense que c'est la même chose en Suisse (ainsi qu'en Italie et en Allemagne où les référendums d'initiative populaire existent).
Le seul moyen, à mes yeux possible, pour remettre en cause ce type de pratique, serait un recours devant la Cour européenne des droits de l'homme. Etant d'ailleurs légèrement spécialisé dans ce contentieux là, je peux vous dire d'ores et déjà que ça ne va pas être facile, parce qu'elle risque de prendre en compte la situation particulière de la Suisse.
Et je m'arrêterai là, il faudra attendre longtemps avant que cela arrive devant la Cour.
Cordialement.
La suisse a une démocratie trop directe avec ce système d'initiative. Tout citoyen peut théoriquement y changer la constitution. Mais n'est ce pas le principe même de la démocratie ? Et donc la preuve que celle ci n'est, au fond, pas un si bon système ?
Et non une telle loi n'est pas forcément anticonstitutionelle (en fait l'initiative va maintenant être transposée dans la constitution suisse, donc elle est tout ce qu'il y a de plus constitutionel. Et puis est anticonstitutionel tout ce qui contredit les dispositions de la constitution.
Imaginons une loi qui veuille qu'on mette en prison tous les noirs, même si elle est totalement stupide, elle est totalement constitutionelle si la constitution ne prévoit rien pour interdire une telle loi.
merci de cette mise au point. Mais alors poursuivons: dans quel cas une loi pourra-t-elle être proposée aux suffrages populaires? Quelles questions pourront être abordées et tranchées ainsi?
Et si j'ai bien compris, une fois la loi approuvée par le peuple cette loi modifie automatiquement la consitution?
Donc une loi interdisant les minarets pourrait être approuvée par ce biais.. franchement cela me semble impensable!(anti-constitutionnel?)
Selon Rousseau, ce qu'a fait le peuple, il peut toujours le défaire.
Mais il y faut des condittions. C'est-à-dire, en fait , une unanimité ou quelque chose du même ordre. Car pour que la loi change il faut que ce soit la volonté générale qui s'exprime, puisque la loi est l'acte de la volonté générale.
Et la volonté générale ne peut pas, par définition, s'exprimer sur un sujet particulier..
L'initiative populaire, une fois les 100.000 signatures nécessaires récoltées, est soumise au parlement et au conseil fédéral (executif en suisse) et le parlement décide de sa conformité avec la constitution (et règles impératives du droit international). Si ca passe, c'est à dire que le parlement ne la refuse pas, elle est soumise à votation, et là plus aucun recours. Elle modifiera la constitution si elle est acceptée. Et donc on se fiche qu'elle soit ou pas constitutionnelle puisqu'au final elle primera sur l'ancienne norme.
Les initiatives ne peuvent entrainer que des modifications partielles de la constitution. Elles sont issues du peuple, qui propose un texte et doit accumuler 100.000 signatures pour qu'elle soit votée par le peuple entier.
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