"La liberté produit tout dans le monde, tout, dis-je, même ce qu'elle y vient détruire, aujourd'hui, religion, gouvernement, noblesse, propriété. De même que la Raison, sa soeur, n'a pas plus tôt construit un système, qu'elle travaille à l'étendre et à le refaire, ainsi la Liberté tend continuellement à convertir ses créations antérieures, à s'affranchir des organes qu'elle s'est donnés et à s'en procurer de nouveaux, dont elle se détachera comme des premiers, et qu'elle prendra en pitié et en aversion jusqu'à ce qu'elle les ait remplacés par d'autres.
La Liberté, comme la Raison, n'exiiste et ne se manifeste que par le dédain incessant de ses propres oeuvres ; elle périt dès qu'elle s'adore. C'est pourquoi l'ironie fut de tout temps le caractère du génie philosophique et libéral, le sceau de l'esprit humain, l'instrument irrésistible du progrès. Les peuples stationnaires sont tous des peuples graves : l'homme du peuple qui rit est mille fois plus près de la raison et de la liberté que l'anachorètes qui prie ou le philosophe qui argumente.Ironie, vraie liberté ! c'est toi qui me délivres de l'ambition du pouvoir, de la servitude des partis, du respect de la routine, du pédantisme de la science, de l'admiration des grands personnages, des mystifications de la politique, du fanatisme des réformateurs, de la superstition de ce grand univers et de l'adoration de moi-même"
Proudhon, les Confessions d'un Révolutionnaire, pour servir à l'histoire de la révolution de février (1849), Éd. M. Rivière, 1929, pp. 291-292.
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