(Merci pour le papier)
Point de vue
4 mars, Rendez-vous crucial pour les Démocrates
Par Dick HOWARD (*)
"La saison des primaires américaines pourrait prendre fin ce mardi 4 mars. L’attention du pays sera braquée sur le vote démocrate dans le Texas et l’Ohio où de l’aveu même de son mari, Hillary Clinton joue son va-tout. Ayant remporté les onze primaires qui ont suivi le « super-mardi » 5 février ,où il était à égalité avec celle qu’on croyait la championne incontestée, Barak Obama a le vent en poupe.
Mais comme les démocrates utilisent la proportionnelle, aucun des deux candidats ne pourra réunir les 2.025 délégués nécessaires. Alors la compétition se poursuivra.
Barak Obama ne distance Hillary Clinton que d’une centaine de voix (1.302 contre 1.212). Peut-on imaginer que Hillary Clinton, soit battue le 4 mars, et qu’elle se décide d’abandonner la course, en estimant qu’elle ferait mieux de conserver l’unité du parti ainsi que ses chances éventuelles en 2012 ? Ce n’est pas son genre. D’autant plus qu’elle a mené une campagne presque sans fautes. Elle peut espérer que le public se lasse du « jeunot », malgré son charisme
Le choix du parti pourrait dépendre en dernier lieu des 842 « superdélégués » qui émanent du parti (voir Ouest France du 24 janvier). Les candidats doivent palabrer avec ces hommes et femmes qui sont censés représenter l’intérêt du parti démocrate, qui n’est pas forcément celui de la démocratie interne au parti.
Jusqu’en 1968, le candidat du parti était désigné lors de la Convention nationale, les primaires ne sont devenues importantes que lorsque Lyndon Johnson dut renoncer à se représenter face à l’opposition à « sa » guerre au Vietnam. Or, la Convention de Chicago nomma malgré cela son vice-président, Hubert Humphrey. Celui-ci fut battu de justesse par Richard Nixon. Le système ne fonctionnait plus.
Entrée en vigueur en 1972, la réforme permit au candidat anti-guerre de rafler la mise avant d’être battu à plate couture. Quatre ans plus tard, un gouverneur inconnu de la Géorgie, Jimmy Carter, sortait vainqueur en 1976. La réforme était à reprendre : elle accordait trop de poids à la base qui, tous les quatre ans, redécouvrait un intérêt à la chose politique avant de rentrer chez elle, laissant le parti se débrouiller tout seul.
Ainsi furent inventés les « superdélégués », censés rétablir la balance entre l’électeur et « son » parti. Que vont-ils faire ? Au départ, Hillary Clinton disposait d’une forte majorité de leurs intentions de vote. Son « expérience » d’ ancienne « première dame »et sénatrice, jouait pour elle. Depuis que Barak Obama a surgi sur la scène, certains sont tentés de suivre leur propre électorat. Ainsi, John Lewis, député de la Géorgie et grand ami des Clinton, vient d’annoncer qu’ il apporterait sa voix à Obama.
Le poids des « superdélégués » ne diminue pas les primaires du 4 mars, bien au contraire. Ce vote approfondira le dilemme du parti démocrate. Car l’ « espoir » porté par le jeune sénateur d’Illinois est aussi celui du renouveau d’une démocratie passablement malmenée par le pouvoir républicain. Peut-on imaginer qu’Obama rapporte encore des primaires (même de peu) et que la convention nomme tout de même Hillary Clinton ?
Il ne faut pas oublier l’Histoire. Les primaires ont leur raison d’être, les « superdélégués » aussi. Il y a entre eux une relation qui fait penser à celle entre la Chambre des députés populaires et le Sénat, censé représenter la réflexion et l’intérêt bien réfléchi. Peut-on inventer l’équivalent au sein du parti ?
Le grand absent des primaires est le président du parti, le fameux Howard Dean, candidat surgi de nulle part en 2004 avant de se dégonfler aussi soudainement. Ce sera à lui d’intervenir, peut-être avec le soutien d’un comité de Sages, pour débloquer la situation. Au mieux, le parti démocrate pourrait refaire une vraie convention nationale. Ce serait un beau spectacle, un parti politique qui, tout en écoutant son électorat, délibère en connaissance de cause sur son avenir".
Point de vue
4 mars, Rendez-vous crucial pour les Démocrates
Par Dick HOWARD (*)
"La saison des primaires américaines pourrait prendre fin ce mardi 4 mars. L’attention du pays sera braquée sur le vote démocrate dans le Texas et l’Ohio où de l’aveu même de son mari, Hillary Clinton joue son va-tout. Ayant remporté les onze primaires qui ont suivi le « super-mardi » 5 février ,où il était à égalité avec celle qu’on croyait la championne incontestée, Barak Obama a le vent en poupe.
Mais comme les démocrates utilisent la proportionnelle, aucun des deux candidats ne pourra réunir les 2.025 délégués nécessaires. Alors la compétition se poursuivra.
Barak Obama ne distance Hillary Clinton que d’une centaine de voix (1.302 contre 1.212). Peut-on imaginer que Hillary Clinton, soit battue le 4 mars, et qu’elle se décide d’abandonner la course, en estimant qu’elle ferait mieux de conserver l’unité du parti ainsi que ses chances éventuelles en 2012 ? Ce n’est pas son genre. D’autant plus qu’elle a mené une campagne presque sans fautes. Elle peut espérer que le public se lasse du « jeunot », malgré son charisme
Le choix du parti pourrait dépendre en dernier lieu des 842 « superdélégués » qui émanent du parti (voir Ouest France du 24 janvier). Les candidats doivent palabrer avec ces hommes et femmes qui sont censés représenter l’intérêt du parti démocrate, qui n’est pas forcément celui de la démocratie interne au parti.
Jusqu’en 1968, le candidat du parti était désigné lors de la Convention nationale, les primaires ne sont devenues importantes que lorsque Lyndon Johnson dut renoncer à se représenter face à l’opposition à « sa » guerre au Vietnam. Or, la Convention de Chicago nomma malgré cela son vice-président, Hubert Humphrey. Celui-ci fut battu de justesse par Richard Nixon. Le système ne fonctionnait plus.
Entrée en vigueur en 1972, la réforme permit au candidat anti-guerre de rafler la mise avant d’être battu à plate couture. Quatre ans plus tard, un gouverneur inconnu de la Géorgie, Jimmy Carter, sortait vainqueur en 1976. La réforme était à reprendre : elle accordait trop de poids à la base qui, tous les quatre ans, redécouvrait un intérêt à la chose politique avant de rentrer chez elle, laissant le parti se débrouiller tout seul.
Ainsi furent inventés les « superdélégués », censés rétablir la balance entre l’électeur et « son » parti. Que vont-ils faire ? Au départ, Hillary Clinton disposait d’une forte majorité de leurs intentions de vote. Son « expérience » d’ ancienne « première dame »et sénatrice, jouait pour elle. Depuis que Barak Obama a surgi sur la scène, certains sont tentés de suivre leur propre électorat. Ainsi, John Lewis, député de la Géorgie et grand ami des Clinton, vient d’annoncer qu’ il apporterait sa voix à Obama.
Le poids des « superdélégués » ne diminue pas les primaires du 4 mars, bien au contraire. Ce vote approfondira le dilemme du parti démocrate. Car l’ « espoir » porté par le jeune sénateur d’Illinois est aussi celui du renouveau d’une démocratie passablement malmenée par le pouvoir républicain. Peut-on imaginer qu’Obama rapporte encore des primaires (même de peu) et que la convention nomme tout de même Hillary Clinton ?
Il ne faut pas oublier l’Histoire. Les primaires ont leur raison d’être, les « superdélégués » aussi. Il y a entre eux une relation qui fait penser à celle entre la Chambre des députés populaires et le Sénat, censé représenter la réflexion et l’intérêt bien réfléchi. Peut-on inventer l’équivalent au sein du parti ?
Le grand absent des primaires est le président du parti, le fameux Howard Dean, candidat surgi de nulle part en 2004 avant de se dégonfler aussi soudainement. Ce sera à lui d’intervenir, peut-être avec le soutien d’un comité de Sages, pour débloquer la situation. Au mieux, le parti démocrate pourrait refaire une vraie convention nationale. Ce serait un beau spectacle, un parti politique qui, tout en écoutant son électorat, délibère en connaissance de cause sur son avenir".
Article paru dans Ouest France le 3 mars 2008
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(*) Professeur à Stony Brook University, à New York, auteur de « Aux origines de la pensée politique américaine » (Ed. Buchet-Chastel).
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(*) Professeur à Stony Brook University, à New York, auteur de « Aux origines de la pensée politique américaine » (Ed. Buchet-Chastel).
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