mardi 27 novembre 2007

Le bonheur dépend-il de l'Etat




Pour répondre à cette question, il faut poser le pb de la distinction du privé et du public




Voici les clarifications de E. Badinter:
Distinction du privé et du public
"Quand des jeunes femmes manifestent pour le port du voile à l'école publique en proclamant : « c'est mon choix », ne confondent-elles pas le Je et le Nous, l'individu et le citoyen, le privé et le public, l'intime et le collectif ? En reprenant à leur compte le titre d'une émission populaire de la télévision, elles se sont trompées de registre. L'expression « c'est mon choix» ne s'applique qu'à ce qui relève de l'intimité et de la vie privée. Par exemple, notre façon de penser, d'aimer, la gestion de notre corps, y compris le suicide, ou notre vie familiale, dès lors que cela ne nuit pas à d'autres. Comme dans l'émission en question, chacun peut dire publiquement : « Je suis homosexuel, célibataire ou masochiste, c'est mon choix. » Autant de décisions personnelles qui relèvent de la liberté individuelle à laquelle la collectivité n'a rien à opposer, même si ces choix ne sont pas conformes à ceux de la majorité.Mais nous sommes aussi membres d'une collectivité nationale, citoyens d'un pays, et comme tels, soumis à la loi de la majorité pour tout ce qui regarde ce qu'on appelle aujourd'hui le « vivre ensemble ». Nous sommes partie prenante à un contrat social qui tire sa force et sa légitimité de l'adhésion collective à quelques principes essentiels, tels les droits de l'Homme, l'égalité des sexes ou la laïcité. L'expression « c'est mon choix » laisse place ici à « c'est notre choix ». Même si moi, en tant qu'individu du particulier, je n'y adhère pas, je m'y soumets en tant que citoyen.Reste qu'il est toujours possible dans une démocratie de changer la loi et parfois de faire passer dans la sphère privée ce qui appartenait hier à la sphère publique. Ce fut le cas, par exemple, il y a 30 ans, de l'avortement. Interdit par la loi qui régissait alors le corps des femmes, il devint, grâce à une nouvelle loi, une affaire de libre choix personnel. Mais pour cela, il fallut d'abord qu'une majorité décide que c'était « notre choix ».
Utiliser le slogan « c'est mon choix » en guise d'argument pour ce qui concerne la sphère publique est aller un peu vite en besogne. C'est une erreur qui peut même, si l'on n'y prend garde, engendrer l'anarchie. La démocratie exige plus qu'un argument d'autorité ou l'affirmation d'un choix personnel. Elle s'exprime par la discussion, l'argumentation et la conviction de la majorité des citoyens".
Élisabeth Badiner

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