Voici la dernière lettre de Pierrot (Pierre Grelot), et le poème de Paul Eluard:
Paris, le 8 Février 1943,
Mes chers parents, mes chers amis,
C'est la fin !... On vient nous chercher pour la fusillade. Tant pis... Mourir en pleine victoire, c'est un peu vexant, mais qu'importe! ...
Le rêve des hommes fait événement...
Nano, souviens-toi de ton frangin. Jusqu'au bout, il a été propre et courageux et, devant la mort même, je ne tremble pas. Adieu petite maman chérie. Pardonne-moi tous les tracas que je t'ai faits. J'ai lutté pour une vie meilleure; peut-être un jour tu me comprendras !
Adieu mon vieux papa. Je te remercie d'avoir été chic avec moi. Garde un bon souvenir de ton fils. Toto, Tototte, adieu, je vous aimais comme mes autres parents. Nano, sois un bon fils, tu es le seul fils qui leur reste, ne fais pas d'imprudence.
Adieu tous ceux que j'ai aimés, tous ceux qui m'aimaient, ceux de Nantua et les autres.
La vie sera belle. Nous partons en chantant. Courage ! Ce n'est pas si terrible après six mois de prison. Mes derniers baisers à vous tous.
Votre Pierrot
Votre Pierrot
Et voici le poème que Paul ELUARD, ami personnel de la famille LEGROS, a écrit pour Lucien LEGROS et ses camarades
AVIS
La nuit qui précéda sa mort
La nuit qui précéda sa mort
Fut la plus courte de sa vie
L'idée qu'il existait encore
Lui brûlait le sang aux poignets
Le poids de son corps l'écœurait
Sa force le faisait gémir
C'est tout au fond de cette horreur
Qu'il a commencé à sourire
Il n'avait pas UN camarade
Mais des millions et des millions
Pour le venger il le savait
Et le jour se leva pour lui.
(1944)
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