dimanche 25 novembre 2007

Garry Kasparov (Entretien JDD)


Garry Kasparov est le porte-parole d'une coalition qui s'oppose au système Poutine. L'ex-champion du monde des échecs, candidat de l'opposition aux présidentielles de 2008, ne se bat pas pour les gagner mais défendre la démocratie et faire entendre une autre voix.

Entretien réalisé mercredi à Paris avant son retour à Moscou.


Quelle est la situation des médias en Russie?

Tout est sous contrôle. Les responsables de la radio et de la télé sont ou bien directement nommés par le Kremlin ou bien tenus par l'Etat via des compagnies comme Gazprom qui les financent. Par un mélange d'intimidations et de pressions financières tels les menaces de contrôles fiscaux, le pouvoir a les moyens d'interdire toute critique.Cela se traduit commentau quotidien?Une journaliste par exemple avait commis un article très dur à l'égard de l'ex-dissident Vladimir Bukovski. Elle a eu honte et s'est excusée le lendemain sur son blop rivé. Elle a aussitôt été renvoyée. Je viens d'écrire un ouvrage* [plus psycho-philosophique que politique]. Parce que je suis une figure de l'opposition, il n'a pu figurer à la dernière Foire du Livre et n'est disponible que dans les rayons « échecs » des librairies...

Quel est le plan média de Poutine ?
Le lavage de cerveaux. A force de répéter les choses dix fois par jour, les gens finissent par le croire. Tout est présenté sous un angle favorable et ils semet en-scène en se réservant l'annonce des bonnes nouvelles.

Un culte de la personnalité?

Non, pour qu'il y ait un culte, il faut une personnalité [Rires]. Poutine est sorti vainqueur d'une lutte intérieure pour le pouvoir mais il n'est que symbolique. Ce n'est pas une dictature à l'ancienne. Il sauve les apparences d'une démocratie dans le pays mais toute la fortune de l'élite dirigeante est dehors.

Quels espoirs face à tous ces relais de la voix du maître?

Le peuple russe ne comprend pas pourquoi il souffre de plus en plus alors que l'État lui, via les ressources énergétiques, s'enrichit. II commence à mettre en relation l'augmentation des prix, les crises avec la corruption étatique. Le pouvoir ne résisterait pas à quelques semaines de liberté de la presse. L'information, ça fonctionne dans les deux sens: il y a aujourd'hui une forte demande".


Interview Jean-Luc Brette
La vie est une partie d'échecs, Ed. J.-C. Lattés, 21,50€

2 commentaires:

Anonyme a dit…

A ce propos, ce jeudi 29 est diffusé "Le système Poutine" à 23h00 sur France 2. J'étais allé voir les réalisateurs s'exprimer à la fnac. Ils avaient montré un extrait. Le reportage à l'air vraiment bon.
On y voit notamment qui est vraiment Poutine : sa passion précoce pour le KGB, son accession au pouvoir, son amour, malgré tout, pour son pays etc..On a du mal à croire que cela soit possible, l'extrait diffusé était assez terrifiant.

Lhansen-Love a dit…

merci!
Ce qui se passe aux portes de l'Europe est ahurissant.
Imagine-t-on Sarkozy faire arrêter Ségolène Royal ou Olivier Besancenot à l'occasion d'une manif, ou les traiter de "chacals"?