Extrait de son entretien dans le Figaro magazine:
Votre oeuvre porte un regard sombre sur notre époque . Cela signifie-t-il que « l'Apocalypse a commencé » ?
Cela ne signifie pas que la fin du monde est pour demain, mais que les textes apocalyptiques - spécialement les Évangiles selon saint Matthieu et saint Marc - ont quelque chose à nous dire sur notre temps, au moins autant que les sciences humaines. A mon sens, outre la menace terroriste ou la prolifération nucléaire, il existe aujourd'hui trois grandes zones de danger. En premier lieu, il y a les menaces contre l'environnement. Produisant des phénomènes que nous ne pourrons pas maîtriser, nous sommes peut-être au bord de la destruction par l'homme des possibilités de vivre sur la planète. En second lieu, avec les manipulations génétiques, nous pénétrons dans un domaine totalement inconnu. Qui peut nous certifier qu'il n'y aura pas demain un nouvel Hitler, capable de créer artificiellement des millions de soldats ? Troisièmement, nous assistons à une mise en mouvement de la terre, à travers des courants migratoires sans précédent. Les trois quarts des habitants du globe rêvent d'habiter dans le quart le plus prospère. Ces gens, nous serions à leur place, nous en ferions autant. Mais c'est un rêve sans issue. Ces trois phénomènes ne font que s'accélérer, une nouvelle fois par emballement mimétique. Et ils correspondent au climat des grands textes apocalyptiques. L'esprit moderne juge ces textes farfelus, parce qu'ils mélangent les grondements de la mer avec les heurts entre villes ou nations, qui sont des manifestations humaines. Depuis le XVI` siècle, sur un plan intellectuel, la science, c'était la distinction absolument nette, catégorique, entre la nature et la culture appartenait à la science tout ce qui relève de la nature, et à la culture tout ce qui vient de l'homme. Si on regarde ce qui se passe de nos jours, cette distinction s'efface. Au Congrès des Etats Unis, les parlementaires se disputent pour savoir si l'action humaine est responsable d'un ouragan de plus à la Nouvelle-Orléans : la question est deve nue scientifique.Les textes apocalyptiques redeviennent le donc vraisemblables, à partir du moment où la confusion de la nature et de la culture prive l'homme de ses moyens d'action. Dès lors qu'il n'y a plus de bouc émissaire possible, la seule solution est la réconciliation des ti, hommes entre eux. C'est le sens du message chrétien.
Achever Clausewitz, entretiens avec Benoît Chantre, Carnets Nord, 384 p., 22,E. et : De la violence à la divinité, Grasset, 504 p., 29 €.Samedi 27 octobre 2007 - LE FIGARO MAGAZINE
2 commentaires:
Je voulais savoir si vous pouviez me donner un lien vers l'article dans sa version intégrale que je n'arrive pas à trouver sur internet.
Merci
Je ne crois pas qu'il y ait un lien pour les articles du Figaro Magazine. Quelqu'un qui lit le Figaro m'a passé l'article..
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